Quel plaisir de visiter la Maison de Champagne Pol Roger guidé par le maître des lieux ! Nous avons eu la chance d’être invités à découvrir de l’intérieur cette prestigieuse Maison, habituellement fermée au public, guidés par Hubert de Billy, représentant de la 5e génération de la famille Pol-Roger qui créa, et dirige depuis, ce domaine d’exception.
Le champagne Pol Roger est né en 1851
C’est dans le jardin, en contrebas de la maison, située très légèrement en retrait de la célèbre Avenue de Champagne d’Epernay, que débuta la visite. Entre l’impressionnant Fau de Verzy de plus de 120 ans, un hêtre qui pousse à l’horizontale, et la fontaine Wallace qui évoque la 3e génération Pol-Roger (Odette Pol-Roger, femme de Jacques Pol-Roger, était née Wallace), Hubert de Billy retraça brièvement l’histoire de la Maison, et plus généralement de la Champagne. Celle-ci débuta en 1851 avec l’installation à Epernay de Pol Roger, fils du notaire d’Aÿ, qui dû faire face à la maladie incurable de son père et à l’impossibilité de reprendre la charge de ce dernier. Les premières vendanges furent vendues au Négoce, mais la marque, en propre, fut créée aux alentours de 1860, avec l’intuition de se concentrer sur des champagnes bruts afin de plaire au marché anglais. Au décès de Pol Roger, en 1899, cette marque jouissait déjà d’une forte renommée internationale. Un désastre survint, en 1900, avec l’effondrement des caves creusées depuis la maison, et d’une partie des bâtiments. Mais les enfants de Pol, Maurice et Georges, surmontèrent cette épreuve et accrurent encore le prestige de la Maison, jusqu’à la Guerre 1914-1918.
Winston Churchill et la Maison Pol Roger, une histoire d’amitié
Bien que particulièrement tourné vers l’export, le développement de Pol Roger se poursuivit malgré la Révolution russe et la prohibition aux États-Unis, mais la crise de 1929, puis l’Occupation allemande l’affectèrent plus sensiblement. L’amitié entre Odette Pol-Roger, précédemment citée, et Winston Churchill fut un formidable accélérateur de notoriété internationale. Ce dernier, dont une statuette trône à l’entrée de la Maison, qualifiait l’endroit du « plus délectable du monde ».
Depuis le début des années 2000, de larges efforts furent fournis afin de moderniser la chaîne de production et de diversifier les débouchés sur de nouveaux marchés d’export.
Chez Pol Roger, on laisse le temps au vin…
Après cette page d’histoire, direction les chais et les caves pour découvrir l’outil de production. Nous débutâmes par la chaîne de tirage (mise en bouteille). Le potentiel de cette dernière est énorme (80 000 bouteilles par jour) et disproportionné par rapport aux besoins réels de la Maison. Mais il permet de ne tirer que de mars à juin, et de laisser du temps au vin. Toute la philosophie de Pol Roger y est ainsi résumée : laisser du temps au vin et en gagner sur toutes les étapes annexes (tirage, dégorgement, habillage). Les cuveries furent entièrement rénovées et agrandies en 2000 et 2008 : des cuves en inox pour la vinification et des cuves en béton pour le stockage. La volonté de laisser aux cépages leur pleine expression incita en effet à ne privilégier que des matériaux neutres : les derniers tonneaux datent de 1975. En nous transmettant ces explications, Hubert de Billy nous rappelait à quel point les changements majeurs s’étalent dans le temps, en l’occurrence 40 à 50 ans.
Les remueurs sont aussi des vignerons
Déambuler dans ces kilomètres de caves, creusées en tunnel, au milieu du stock de 9 millions de bouteilles, jusqu’à 35 mètres de profondeur, est une expérience unique. Cette promenade permit surtout de rappeler l’immense dextérité, et la grande autonomie des remueurs. Responsables d’un stock qui leur est imparti, les 4 remueurs de la Maison sont capables de manipuler 60 000 bouteilles par jour. La particularité de ces ouvriers sparnaciens est qu’ils sont aussi fournisseurs de la Maison grâce aux lopins de vignes qu’ils possèdent. Cet attachement au produit et la connaissance qu’ils en ont expliquent leur supériorité technique et productive par rapport à leurs homologues rémois. Hubert de Billy, avec un sourire non dissimulé, nous expliquait en effet que, lors de son stage en tant qu’ouvrier effectué à Reims, les remueurs locaux plafonnaient à 20 000 bouteilles par jour.
Les caves de Pol Roger connaissement, depuis mars 2018, une évolution majeure avec le passage de relais du chef de caves entre l’ancien Dominique Petit et le nouveau Damien Cambres.
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Auteur : Aurélien Grevet
Image © Vinoptimo